Les écrevisses appartiennent à la classe des crustacés et à l’ordre des décapodes.
Sept espèces d’écrevisses peuplent les eaux françaises, trois sont vraiment autochtones. Bien que devenue rare, l’espèce qui est encore la plus présente parmi ces trois est l’écrevisse à pieds blancs : Austopotamobius pallipes, c’est l’écrevisse de ruisseau par excellence. Autrefois très commune, c’est celle que pêchaient en abondance nos pères ou nos grands-pères. Elle a commencé à se raréfier dans les années 60 à 70, victime de la "peste des écrevisses" qui est en fait un champignon parasite et de la pollution, mais aussi à cause du colmatage des fonds de beaucoup de cours d’eau. En Aveyron, elle n’est plus présente que dans quelques rares ruisseaux isolés et sa pêche est désormais interdite.
(On peut citer pour mémoire une espèce proche qui est l’écrevisse des torrents, semble-t-il encore plus rare).
L’autre espèce autochtone est l’écrevisse à pattes rouges, Astacus astacus. Considérée comme la plus fine d’un point de vue gastronomique, elle a été hélas victime du même mal que la précédente. Elle atteint une taille plus importante que la "pieds blancs". Elle vit dans des eaux plus calmes à condition qu’elles soient de bonne qualité et bien oxygénées. C’est une espèce qui se prêtait bien à l’élevage. Enfant, j’ai le souvenir d’un parent qui en possédait de pleins bassins et du régal qu’elles procuraient à table.
Une autre espèce du continent européen, l’écrevisse à pattes grêles ou écrevisse turque : Astacus leptodactylus. Celle-ci se distingue par ses pinces longues et étroites et sa couleur tirant sur le verdâtre. C’est l’espèce qui est la plus couramment commercialisée. Elle vit dans les rivières lentes et les lacs. A ma connaissance, elle n’est pas présente en Aveyron.
Les trois autres espèces sont des espèces américaines qui ont colonisé nos eaux françaises. Elles sont considérées comme invasives, en ce sens qu’elle portent atteinte à la biodiversité en consommant nombre d’invertébrés benthiques.
Ces trois espèces font courir une grave menace sur les écrevisses autochtones qui subsistent dans la mesure où elles sont considérées comme porteuses de la peste des écrevisses sans en être affectées. C’est entre autres une des raisons pour laquelle il ne faut absolument pas les déplacer pour les introduire dans de nouveaux cours d’eau.
Une de ces trois espèces affectionne les eaux calmes et riche en végétation, c’est l’écrevisse de Louisiane : Procambarus clarkii. A ma connaissance, elle ne semble pas encore présente en Aveyron et c’est tant mieux, car c’est une espèce très invasive et indésirable par le fait qu’elle creuse de profondes galeries qui minent les berges. Elle exerce surtout une très forte concurrence aux autres espèces.
Une deuxième espèce par contre, résistante aux agressions que subit le milieu, est présente sur tout le territoire ; il s’agit de la petite écrevisse américaine : Orconectes limosus. Nous la trouvions en Aveyron, notamment dans le lac de Pareloup, du moins avant qu’elle ne soit supplantée par l’écrevisse "Signal". Elle est de petite taille, de couleur brun clair verdâtre, ses pinces sont également petites. On l’identifie assez facilement en observant les segments de son abdomen qui portent des bandes transversales de couleur lie de vin.
Mais, la plus connue et la plus répandue des écrevisses américaines est l’écrevisse de Californie : Pacifastacus léniusculus, plus communément appelée écrevisse "Signal". Elle doit son nom aux tâches claires, bleu verdâtre qu’elle porte à l’articulation de chaque pince, ce qui permet de l’identifier et souvent de la repérer pour qui a un regard exercé. Introduite il y a une vingtaine d’années, sa grande taille et sa forte prolificité (autour de 200 œufs par femelle) lui a permis de coloniser la plus grande partie de nos cours d’eau. Elle est bien présente sur le Lot et plusieurs de ses affluents, ainsi que sur la plupart des cours d’eau du Sud Aveyron.
Sa présence pose un réel problème dans les eaux de première catégorie. Cette espèce d’écrevisse consomme en effet une masse importante d'invertébrés, en particulier certaines espèces de portefaix comme les potamophylax qui constituent un apport très important dans l’alimentation des truites qui s’en voient alors privées avec les répercussions qui en découlent sur leur croissance ainsi que sur leur prolificité. Les écrevisses occupent également les caches où elle font également concurrence aux truites dans les abris générant un facteur de stress pour celles-ci, d’autant plus pour les jeunes sujets. Ceux qui transportent ces écrevisses pour les introduire dans un ruisseau proche de leur domicile devraient y réfléchir à deux fois avant de commettre l’irréparable.
La pêche des écrevisses
La pêche des écrevisses peut s’avérer passionnante et très productive pour peu que l’on soit bon observateur et rationnel dans sa pratique.
Le matériel
Il existe différents types de balances, les simples avec un seul cercle, un peu tombées en désuétude et celles avec un deuxième cercle qui constitue un rebord. Ce sont ces dernières qui sont préconisées. Il est parfois utile que le fond de la balance soit lesté par une masselotte de plomb (certaines le sont d’origine), cela facilite leur mise en place en permettant de bien les plaquer sur le fond. Certaines balances modernes disposent d’une coupelle munie d’un ressort qui sert à coincer l’appât, c’est un procédé très pratique et rapide. Si vos balances n’en possèdent pas, je vous conseille d’attacher l’appât avec un lien en traversant la chair (viande ou poisson) à l’aide d’une aiguille à locher, ainsi il tiendra solidement et il sera moins facile pour les écrevisses de le dérober.
Chaque balance attachée de façon bien équilibrée sera reliée à une cordelette suffisamment longue permettant de bien la placer et de la récupérer. Un gros flotteur (bouchon de liège par exemple) glissé sur chaque cordelette peut faciliter la relève des balances, empêchant la cordelette de se noyer en la maintenant à la verticale. Vous devez également prévoir une perche qui peut être une tige de noisetier, l’idéal étant une canne télescopique réformée à l’extrémité de laquelle vous aurez emmanché une petite fourche qui permettra de saisir et de faire coulisser la cordelette.
Les appâts
Nos anciens connaissaient tous l’utilisation de la tête de mouton, ils y ajoutaient quelques gouttes d’apéritif à l’anis. Je vous assure que la recette est toujours d’actualité. Plus simplement, un morceau de viande à forte odeur agit très bien, ainsi que des poissons ou morceaux de poissons de nos rivières comme le gardon ou la vandoise. Sinon, achetez des sardines de belle taille, leur odeur prononcée attire bien les écrevisses (certains utilisent des croquettes à chien enfermées dans un petit sac à mailles fines, type sac à oignons).
Pose et relève des balances
Ces gestes paraissent on ne peut plus simples, mais ils font parfois toute la différence dans le résultat de la pêche. Avant de poser vos balances bien garnies de l’appât, faites une petite reconnaissance des lieux afin de les placer sur un poste judicieux, une balance bien placée vaut mieux que plusieurs mises n’importe où et n’importe comment.
Lors de la pose sur le fond, veillez à ce que les balances soient le plus à plat possible et que les cercles des armatures se superposent parfaitement. Surtout veilez à ce que la balance colle au mieux sur le fond de la rivière afin qu’il n’y ait pas d’espace permettant aux écrevisses, très malines à ce jeu, de se glisser par dessous pour manger tranquillement l’appât sans risque pour elles.
Dans les coins riches en écrevisses, lorsque celles-ci sont en activité, trois balances par pêcheur suffisent amplement, elles sont ainsi plus faciles à surveiller et cela évite de se faire dérober les appâts à son insu. Lorsque vous jugez qu’une balance est bien chargée en écrevisses, il faut la relever, c’est l’instant délicat, mais c’est aussi le grand moment de plaisir de cette pêche.
Après avoir passé la cordelette dans la fourche, amenez celle-ci à l’aplomb de la balance et soulevez dans un mouvement continu, mais sans brusquerie, le plus verticalement possible jusqu’à sortir de l’eau. Là, déposez la balance chargée de ses occupants dans un espace, que vous aurez repéré à l’avance, assez éloigné de l’eau (les écrevisses échappées de la balance sont promptes à regagner leur élément).
Pour ne pas vous faire pincer, (ça peut être très douloureux) saisissez chaque écrevisse sur le dos, à l’arrière immédiat du thorax. Afin de conserver vos captures dans un bon état de fraîcheur, pensez à emporter une glacière.
Préparation des écrevisses
Avant de les consommer, je recommande de les faire jeûner pendant 48h dans un bac rempli d’eau fraîche dont on changera l’eau matin et soir, sans oublier d’utiliser un aérateur d’aquarium pour l’oxygénation.
La façon la plus facile de tuer une écrevisse est de la châtrer. L’opération s’effectue en faisant pivoter l’écaille centrale (il y en a 5) de l’extrémité de la queue, le telson, et en tirant dessus, ce qui extrait une partie du tube digestif et condamne rapidement l’écrevisse.
Recette
La recette la plus simple est de les faire cuire dans une grande poêle à frire avec un fond d’huile d’olive en recouvrant avec un grand couvercle pour éviter les projections d’huile. Les faire cuire en les retournant avec une pince jusqu’à ce qu’elles soient devenues rouges des deux cô-tés. Assaisonnez à votre goût et ac-compagnez votre repas d’un bon vin blanc sec (à consommer bien sûr, avec modération).
Bon appétit !
Jack Tarragnat
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