L’élevage face aux maladies virales
Au 18 octobre, 186 foyers de FCO ont été recensés dans le département, ainsi que 234 foyers de MHE.
Le choix de la vaccination
La vaccination, encouragée par le Groupement de défense sanitaire de l’Aveyron (GDSA), a montré son efficacité. : «Un bon nombre des cas aujourd’hui déclarés ont lieu dans des élevages qui n’ont pas été vaccinés» explique le GDSA. Mais la vaccination a un coût.
Les vaccins pour les sérotypes 4 et 8 de la FCO sont à la charge des éleveurs. Seule la filière ovine — où la mortalité est la plus élevée — bénéficie de la prise en charge par l’État pour le sérotype 3. Une différence de traitement dénoncée par les syndicats agricoles.
Présidente de la FDSEA, Marie-Amélie Viargues explique : «Ovins comme bovins sont touchés par la FCO. On espère que pour l’heure il s’agit d’un manquement. La question a été posée au niveau national.»
Clémence, éleveuse bovin viande à Lassouts, a décidé de ne pas recourir à la vaccination, du moins, pour les mères. Pour pouvoir être exportés, les broutards doivent être vaccinés contre la FCO. L’éleveuse confie : «L’année dernière, nous avons eu 20 cas de FCO chez les mères, sans perte. Cette année, on a misé sur l’immunité du troupeau.»
Également touché en 2023 par la FCO, Gildas, éleveur de brebis à Druelle, et syndiqué à la Confédération paysanne de l’Aveyron, a lui aussi compté sur l’immunité de son troupeau : «On doit laisser la liberté aux éleveurs de choisir. L’automne dernier, nous avions eu cinq cas cliniques et deux pertes. On a décidé de rentrer les brebis plus tôt et puis le troupeau a développé une immunité au sérotype 8. Le nouveau sérotype m’inquiète, j’espère que l’arrivée de l’hiver mettra fin à sa progression.» Si l’Aveyron ne présente pas de foyers de FCO-3, il est depuis le 18 octobre en grande partie couvert par la zone régulée qui s’étend sur 150 km à partir des foyers. Cette dernière limitant les déplacements des cheptels.
Quant à la MHE, l’État a mis en place une zone vaccinale afin de limiter la propagation de la maladie. Une prise en charge dont ne bénéficie pas les éleveurs aveyronnais, en dehors de cette zone “tampon”.
Un coût financier et moral
Chaque matin, Clémence redouble de vigilance : «On surveille les vaches à la recherche du moindre signe.» Une raideur dans les pattes, des difficultés à s’alimenter, de la fièvre... Dès qu’il y a quelque chose on se demande : est-ce que c’est l’une de ces deux maladies ? C'est un stress supplémentaire. Il y a les conséquences à l'instant T quand l'animal est malade, puis sur le long terme : la reproduction et le vêlage. L’année dernière, nous avons eu 2 naissances prématurées. Pour l'un, la vache n’était pas prête du tout, elle n’avait pas de lait. Le veau est mort le lendemain. Au-delà de perdre un veau, le risque c'est aussi de perdre la mère.»
Un stress au quotidien parfois difficile à supporter confie Gildas : «Certains éleveurs sont désemparés. Ils ont besoin d’un soutien psychologique ou de temps pour pouvoir souffler. La MSA — Mutualité Sociale Agricole — propose une aide au répit. Un dispositif essentiel que la Confédération paysanne aimerait voir davantage mis en avant et diffusé sur le territoire.»
Le syndicat réclame également des ajustements de la Politique Agricole Commune (PAC) pour prendre en compte les pertes d'animaux liées à ces maladies : «Certaines aides dépendent du nombre d’animaux par hectare, ce qui peut pénaliser les exploitations affectées par des pertes.»
Au-delà d’une indemnisation pour les pertes directes, la FDSEA demande la prise en compte des pertes indirectes : «Des risques de stérilité pour les taureaux, des vaches qui n'arrivent pas à terme, qui ont plus de mal à être gestante, moins de lait... Cela affecte les naissances et l'activité des éleveurs» décrit la présidente du syndicat.
En plus de ces risques, les éleveurs doivent composer avec d’autres frais comme les prises de sang nécessaires à l’exportation des broutards pour Clémence : «Par exemple, avec la MHE, les laboratoires demandent 11 euros par veau pour au moins 10 veaux, mais si c’est moins, ça monte à 16 euros par veau. À quel moment c’est entendable ?», s’insurge l’éleveuse.
Une fois la vague passée ?
«Maintenant c’est la FCO et la MHE, demain on ne sait pas quelle autre maladie pourront toucher les élevages» s’interroge Gildas.
Les éleveurs attendent un travail sur le suivi des sérotypes et sur la génétique des troupeaux pour développer leur immunité. «Il faut que les éleveurs soient mieux accompagnés pour résister au passage des virus.»
De son côté, Clémence aimerait avoir la possibilité de faire elle-même certains actes vétérinaires : «Nous sommes pieds et mains liés. Pour certains actes, nous pourrions les réaliser nous-même, mais nous devons faire appel aux vétérinaires. On paie le déplacement, l’acte et le produit. On est obligé de mettre la main à la poche, et d’un département à l’autre, ça peut passer du simple au double. C'est un métier qu'on aime, sinon on ne le ferait pas, mais c'est aussi notre gagne-pain. On ne fait pas n'importe quoi avec nos animaux.» Elle ajoute : «Plus largement, j'aimerais une reconnaissance de l'implication des éleveurs, de la charge autant financière que mentale. Mais ça dépasse la question sanitaire.»
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A.C
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