Environ 750 radios associatives bénéficient du FSER, le Fonds de soutien à l’expression radiophonique. Créé en 1982, ce dernier représente en moyenne 40 % des ressources de ces radios. Problème : le projet de loi de finances pour 2025 prévoit de baisser de 10 millions d’euros ce fonds de soutien.
«Un coup de guillotine»
Fixé à 35,7 millions d'euros en 2024, le FSER passerait en 2025 à 25,3 millions d’euros. Plus qu’une coupe budgétaire, «un coup de guillotine».
Alex Quérel, administratrice et animatrice de Radio Larzac confie : «Aujourd’hui c’est tout notre modèle économique qui est remis en question.» Pour Nadine Teissedre, présidente de Radio Margeride et Nathalie Maury, salariée de la radio lozérienne, cette annonce inattendue bouleverse les projets de la structure : «On souhaitait proposer un CDD à notre service civique, on avait un projet de construction... tout est remis en cause. Si la baisse est actée, ce sera la plus grande crise du secteur depuis la naissance des radios associatives.»
Des ondes de révolte
Face à l’ampleur de l’enjeu, les radios se mobilisent. Ce mardi 15 octobre, plus de 200 radios associatives ont participé à une réunion tenue en urgence par les syndicats de radios locales. «C’est le signe d’une mobilisation importante. On va se battre, on ne veut pas fonctionner au rabais», confie Pierre-Etienne Vanpouille, président de Radio Temps Rodez (RTR).
Pour l’antenne ruthénoise, le FSER représente 50 % de ses ressources financières. «Si cela passe, on pourra tenir un an avec nos trois salariés... pas plus. Après, nous devrons nous séparer de quelqu’un.»
Les radios associatives, du fait de leur statut, ont des revenus limités. Pour être éligibles au FSER, elles ne doivent pas dépasser 20 % de ressources commerciales. La publicité, très encadrée, ne constitue donc qu’une source minime de revenus, voire inexistante puisque beaucoup n’y ont pas recours.
Crucial pour la survie des radios associatives, un FSER amoindri conduirait à la suppression de 800 emplois sur les 3.000 que compte le secteur.
Un rôle crucial menacé
Les radios associatives jouent un rôle clé dans la vie des territoires, notamment ruraux. Elles participent à la promotion des initiatives locales, des événements culturels, contribuent à la vie associative du territoire et à l’expression de ses habitants, sans oublier l’éducation aux médias et à l’information (EMI). Chaque année, plusieurs centaines de jeunes aveyronnais, de l’école primaire au lycée, sont sensibilisés aux fake news et apprennent les dessous de la fabrication de l’information grâce aux différents ateliers menés par les radios associatives aveyronnaises. «Si on oublie la mission qui nous est confiée par l’État, on pourrait diffuser de la musique en permanence à l’antenne sans salarié ni bénévole. Mais quel intérêt ? Aucun», affirme Pierre-Etienne Vanpouille.
Car le FSER, plus qu’une subvention, est une contrepartie à l’exercice de la mission de communication sociale de proximité des radios associatives, une mission de service public permettant d’offrir des contenus diversifiés proches des préoccupations de leurs auditeurs. Les radios s’investissent dans des actions essentielles pour la cohésion sociale et la démocratie sur leur territoire. En justifiant de ces actions en EMI, autour de l’environnement, et contre les discriminations, les radios associatives peuvent prétendre au FSER. «Ce n’est pas une subvention qui nous est donnée, ce n’est pas un cadeau. C’est ce qu’il nous faut pour pouvoir assurer nos missions.»
Nadine Teissedre ajoute : «En cassant le modèle de nos structures, le gouvernement menace la liberté d’expression. On donne la parole à des personnes qui ne l’ont pas : nos antennes se construisent avec nos bénévoles. Des habitants du territoire qui viennent partager leurs passions, des associations qui viennent créer du lien et développer des initiatives locales. 40 ans d’existence, d’ancrage local, d’actions, d’initiatives... disparaître, ce serait un grand manque pour nos territoires ruraux.»
Un revirement inattendu
«Ça a été une grande surprise pour tout le monde. Personne ne s’y attendait, c’est même à contre-courant de ce qu’on nous avait laissé espérer» confie Axel Quérel.
Et pour cause, en juillet, la ministre Rachida Dati annonçait dans son «Plan Culture et Ruralité» accroître le soutien aux radios associatives rurales et d’Outre-mer. Saluant le rôle de ces structures dans ces territoires, un «bonus» de 10.000 euros devait être versé à près de 220 radios. Une aide supplémentaire qui devait voir le jour via... le FSER. Depuis, silence radio.
Guillaume, technicien à Radio Saint-Affrique, s’interroge : «Comment ces 10 millions d’euros en moins vont nous toucher ? Quels volets du FSER seront concernés ? On a une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes. Combien de temps avons-nous pour agir avant que cela passe ? Si on peut faire appel aux dons dans un premier temps, ce n’est certainement pas une solution viable… On ne sait pas à quelle sauce on va être mangé.»
Sur les 12 millions d’euros d’économies demandées à la DGMIC — Direction générale des médias et des industries culturelles —, 10,4 millions d’euros seront entièrement supportés par les radios locales associatives, alors que ces dernières ne représentent que 4 % de l’enveloppe budgétaire globale dédiée.
Face à la levée de boucliers générale du secteur, le cabinet ministériel recevra ce vendredi les principaux syndicats et fédérations de radios associatives.
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