Dissolution de l’Assemblée
En annonçant la dissolution de l'Assemblée à 21 heures dimanche, plusieurs heures avant la publication des résultats définitifs des élections européennes, Emmanuel Macron, dont les candidats ont subi une lourde défaite, prend les partis politiques de cours et sème le trouble chez les électeurs.
Coup de tonnerre et coup de poker
Avec à peine 5 jours pour déclarer les candidatures, et moins de trois semaines avant le premier tour, les législatives s'annoncent d'un genre particulier, avec une campagne éclair qui sera forcément bâclée, et dans laquelle le message politique se limitera à un vote anti-macron ou anti-extrêmes. Dans le contexte international actuel et à l'approche des jeux olympiques, la soudaineté de l'annonce du président, qui aurait pu différer sa décision de 24 heures, résonne comme un coup de tonnerre et risque de paralyser le pays pour plusieurs semaines.
De nombreux observateurs voient dans ce choix une tactique politique qui s'apparente à un coup de poker dont le premier effet est de masquer derrière un écran de fumée la défaite de dimanche. Un coup de maître qui anéanti par la même occasion tout le travail effectué dans le cadre des élections européennes, reléguées au second plan. En déstabilisant les partis qui n'auront que peu de temps pour préparer les candidatures, Emmanuel Macron va limiter la campagne à une bataille rangée dans laquelle les anciens partis de gouvernement, Les Républicains et les Socialistes, risquent encore de laisser des plumes.
Vers une Assemblée morcelée ?
À la condition que le Rassemblement National ne l'emporte pas, et en jouant sur cette hypothèse qui fait peur à une partie de l'électorat, le président espère peut-être rejouer la finale des présidentielles. Mais cela sera-t-il suffisant pour améliorer sa majorité à l'assemblée, ce qui est en général le but d'une dissolution, et Emmanuel Macron a-t-il pris la mesure du rejet qu'il suscite dans une partie de l'électorat ?
À moins de vouloir mettre le Rassemblement National, en cas de victoire, au pied du mur pour gouverner pour la première fois : sans résultat dans les 3 ans, le parti de Marine Le Pen arriverait à la prochaine présidentielle usé par la pratique du pouvoir et en position de faiblesse...
Dans tous les cas, les élections législatives ne sont pas comparables aux européennes, car il faut des candidats dans toutes les circonscriptions : l'effet de “prime au sortant”, qui bénéficie aux élus déjà en place, pourrait fonctionner pour les députés RN, au nombre de 88, mais la majorité absolue se situe à 289. Les macronistes risquent peut-être de laisser des plumes dans l'affaire, qui pourrait bénéficier à la gauche en cas d'union (ce qui semble être acté) : on aurait alors pour résultat une Assemblée obligée de fonctionner en coalition, ce qui n'est pas dans la culture politique de la Ve République, et un président dans une situation de cohabitation “flottante”.
Car sans majorité identifiée à l'Assemblée, la difficulté sera de désigner un Premier ministre et un gouvernement stable.
Bref, quelle que soit la motivation d'Emmanuel Macron pour dissoudre, le moment semble bien mal choisi au vu du contexte international et intérieur au pays, avec la fin de l'année scolaire, l'Euro de foot et les Jeux Olympiques qui se profilent.
XP
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