Saint-Côme d'Olt
Sur le Chemin de Saint-Jacques
Le Gîte del Roumiou* est l'ancien gîte communal saint-cômois : après l'avoir géré en direct pendant près de 20 ans, la mairie met ce lieu d'accueil en gérance en 2009, d'abord à Marie-Paule Bès puis, en 2014, à Sabine et Sylvain Gosselin, qui s'en rendront acquéreurs. Le 1er juillet 2022, un nouveau chapitre s'est écrit dans l'histoire de l'étape saint-cômoise, avec l'arrivée de Sophie et Gaëtan Vercoutere.
Les deux quinquagénaires sont originaires du Nord, plus précisemment de Croix dans la région lilloise pour Gaëtan, et de Dunkerque pour Sophie. Cadre dans la grande distribution pendant 26 ans, Gaëtan éprouve, il y a quelques années, le besoin de faire une pause dans sa vie professionnelle. C'est ainsi qu'en 2019, à l'occasion d'un congé, il prend le Chemin sur la Via Podiensis, la voie du Puy. Il ira jusqu'aux Pyrénées, mais en deux fois, une blessure le contraignant à s'arrêter à Moissac, et la santé de ses parents le rappelant dans le Nord, avant de parvenir à Saint-Jean-Pied-de-Port, où il sera hospitalier, c'est-à-dire bénévole donnant de son temps pour l'accueil des pèlerins.
Du rêve à la réalité
C'est sur le Chemin qu'est née l'idée d'un «projet pour changer de vie» raconte Gaëtan. Comme une révélation, mais qui a dû, elle aussi, faire son chemin, avant de devenir une évidence, il s'imagine accueillant les autres, mais précise que c'était alors «plutôt en mode “rêve”». Un rêve qui prend forme en devenant «un projet de couple, avec la volonté de vivre une aventure à deux».
En 2021, Gaëtan reprend sa route là où il l'avait laissée, sur le “Camino Francès”, la partie espagnole du Chemin vers Santiago. Cette même année, Sophie se lance elle aussi sur le Chemin, du Puy à Figeac, «pour découvrir un peu et vivre l'expérience d'un pèlerin, pour mieux les acueillir», explique l'ancienne cadre d'une structure associative en milieu social. Car tous deux ont désormais comme objectif l'acquisition d'un gîte d'étape : «Il nous fallait au moins 15 places pour pouvoir en vivre, et on avait d'abord pensé à Condom, dans le Gers, ou à Figeac».
«Ça devait être ici»
Dans l'intervalle, Gaëtan passe un CAP de cuisine : «Je savais cuisiner, mais c'était au cas où le projet d'accueil n'aboutisse pas, pour pouvoir faire autre chose». Après un projet avorté dans le Lot, l'opportunité saint-cômoise se présente. Un village dont l'hébergement de Malet avait laissé un excellent souvenir à Sophie. Quand à Gaëtan, il y était arrivé avec un genou blessé : «À Saint-Côme, j'avais rencontré Christiane, Marcelle et Monique, qui m'avaient gentiment “reboosté”» se souvient-il, «et quand je suis revenu pour prendre le gîte, je les ai retrouvées, et elles m'ont tout de suite reconnu, deux ans après : “C'est notre pèlerin blessé !”».
Ce sont de petits signes, comme cette pèlerine accueillie lors de leur première saison, qui elle aussi a reconnu Gaëtan et lui a montré le selfie qu'ils avaient fait ensemble à Saint-Jean-Pied-de-Port, qui font dire à Gaëtan : «Je pense que ça devait être ici, à Saint-Côme».
«On est remercié tous les jours»
Aujourd'hui, Sophie et Gaëtan sont certains d'avoir fait le bon choix : «Nous sommes contents d'accueillir, d'écouter... on a de super retours, et même si c'est parfois difficile, on est remercié tous les jours». Car la saison court du 1er avril au 31 octobre, et les 18 couchages répartis en 3 dortoirs sont souvent occupés en totalité : à 19 heures, il faut nourrir 80% des pèlerins, et assurer les petits déjeuners dès 7 heures le matin, voire plus tôt en été. «Mais il nous reste 5 mois pour voir nos enfants, nos amis, et nous reposer».
Eux qui étaient «plutôt des urbains» apprécient désormais le calme et la proximité de la nature, qu'ils découvrent chaque année un peu plus avec le club de randonnées saint-cômois.
En termes d'organisation, Gaëtan est aux fourneaux, même s'il précise qu'il sait faire le ménage, et que Sophie cuisine également. Dans l'ensemble, le gîte est vide en journée, «sauf quand on a un pèlerin épuisé, comme une fois un Japonais qui a dormi un jour entier : j'ai dû faire le ménage autour de lui» raconte Sophie.
«On a des histoires comme ça»
En ce début de saison, le 10 avril, vers 18 heures, les passagers d'un jour commencent à se rassembler dans la salle commune, qui fleure bon le curry de volaille. Gaëtan et Sophie servent des boissons et nouent les liens d'une écoute qui sera brève mais sincère, celle des hospitaliers.
Aux côtés de Jérôme, de la Bresse, une famille d'Australiens venus de Maryborough, dans le sud du Queensland, prend place : Neil, Christin, leurs 3 filles Rebecca, Carla et Morgan, accompagnés de Jenny, la sœur de Christin. Gaëtan me sert d'interprête car l'accent australien ne m'est pas familier, et nous apprenons que les deux sœurs ont déjà fait le Chemin et séjourné à Saint-Côme il y a quelques années. Suite au décès subit d'Alex, le fils de Neil et Christin, ils ont décidé de revenir en famille et de marcher pour lui... «On a des histoires comme ça sur le Chemin», conclut Sophie. Et c'est bien.
XP
*En occitan, le terme “roumiou” désigne un pèlerin, “celui qui va à Rome”.
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