Bien sûr, c’était toujours un dimanche. J’accompagnais mes parents qui parlaient des caprices du temps, du prix de la sucrine et de celui du kilo de persil qui se vendait bien cette année-là, à cause du froid. À l’époque, l’on votait à la salle des fêtes qui se trouvait encore entre la poste et la mairie. Au bas des isoloirs, nous apercevions les jambes des adultes. Et j’écoutais le bruit des bulletins glissés furtivement dans l’enveloppe avec, pour les municipales, celui du crayon qui rayait le nom des candidats.
Et puis, arrivait l’heure du dépouillement. Le maire, solennel, devant l’urne, les assesseurs, les scrutateurs. L’ouvrier et le “propriétaire” au coude-à-coude, égaux devant les affaires de l’Etat, mandatés pour comptabiliser le vote citoyen entre la photo de Pompidou et le petit meuble républicain. Egaux, le prolétaire et le notable, qui retenaient quelques rictus quand sortait le nom des candidats.
Et, dans la salle, le silence, la fumée des cigarettes, les regards graves, le morceau de papier où certains rajoutaient des barres. Un peu comme la veille ils posaient, ici même, des grains de maïs sur des numéros pour gagner, à carton plein, un filet garni, un dindon vivant et un tri-pack de vins.
Enfin, tombaient les résultats que personne n’osait commenter en public. Les enveloppes bleues qu’on recompte, les piles de bulletins, les gendarmes qui viennent les récupérer.
Et, posée près du radiateur, la veste, bien sûr, que certains ne pourront oublier.
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.