Vendre des billets de 0 euro : il fallait un Auvergnat pour imaginer un truc pareil ! Et ce n'est pas une arnaque, ni une fausse solution anti-crise. PDG d’Euro BankNote Memory (EBM), Richard Faille, qui avait déjà créé la médaille souvenir en 1996, a inventé le billet touristique en 2015, et si vous n'en avez jamais vu, sachez qu'il s'en est déjà écoulé plus de 15 millions sur 2.500 sites touristiques, dont plus de 400 en France.
Spécialiste de la vraie fausse monnaie touristique
Parmi les 84 nouveaux billets ayant été édités depuis le début de cette année 2022, on trouve la Bête du Gévaudan, pour le compte du Comité départemental de Tourisme de la Lozère, ou encore les caves de Roquefort Société. Localement, ils viennent rejoindre la cathédrale de Rodez, le viaduc de Millau, Micropolis ou Montpellier-le-Vieux. «C'est un vrai billet de banque, un produit de collection, un souvenir officiel, avec une technicité 100% identique à celle d'un billet officiel», explique Richard Faille, qui n’en est pas à son coup d’essai.
L’homme d’affaire est né en 1967 à Chamalières. Il est pensionnaire au collège Cévenol en Haute-Loire lorsqu’un ami lui rapporte des États-Unis un pressed penny (un “penny pressé”), une pièce de monnaie déformée dans une machine et marquée à l’image d’un site touristique, comme l’Empire State Building. L’Auvergnat imagine alors importer le concept en France, mais la loi interdisant de dégrader la monnaie, il se rabat en 1996 sur la médaille souvenir, qu’il réalise en partenariat avec la Monnaie de Paris.
C’est un succès immédiat, qui se développe par le biais de distributeurs de pièces, à l’origine à 10 francs, sur de nombreux sites touristiques français : lorsque la Monnaie de Paris rachète son affaire en 2012, 60 millions de pièces de 1.500 modèles différents ont été vendues, un chiffre qui est aujourd’hui de l’ordre de 100 millions !
Un billet qui passe au détecteur !
En 2015, Richard Faille récidive et invente tout simplement la version papier de la pièce souvenir : il décide de faire réaliser de vrais billets avec une valeur faciale de 0 euro, qu’il propose à des sites touristiques. Lui qui, enfant, passait tous les jours devant l’imprimerie de la Banque de France à Chamalières, aurait souhaité confier à cette institution française l’impression de son nouveau concept.
L’affaire ne se fera pas, mais Euro BankNote Memory se tourne vers la société française Oberthur Fiduciaire, l’un des principaux imprimeurs fiduciaires au monde, et son projet est homologué par la Banque centrale européenne (BCE). Richard Faille est ainsi devenu l’un des quelque 230 clients fiduciaires au monde, qui sont quasi exclusivement des banques centrales !
Et ses billets ont tout des vrais : «C’est le format du 20 dans la couleur du 500, le filigrane, le fil de sécurité, l’hologramme, la numérotation : quand vous le passez dans un détecteur, il ressort comme un vrai !» s’enthousiasme leur créateur. Il y a même des faux qui ont été imprimés en Chine, mais de qualité moindre…
Des billets déjà pièces de collection
C’est cette qualité, que Richard Faille a souhaité dès la sortie des premiers billets, qui fait que les collectionneurs s’en sont emparés : «C’est un pur produit collectionneurs, car en plus d’être de vrais billets, ils ont chacun leur numéro». Il existe également des classeurs destinés au rangement des billets, et de nombreux sites d’échange et associations de collectionneurs se sont créés, dont un recommandé par EBM (www.billets-touristiques.com) sur lequel on trouve liste et caractéristiques des billets, dont certains se négocient plus de 1.000 euros ! Une rareté parfois due à un défaut, comme le billet de Sarlat illustré de la statue des Trois Oies qui se retrouvent… 6 oies sur le tirage initial, et qui se vend près de 300 euros !
L’Arc de Triomphe en tête des ventes
En 2015, quand il lance le concept, Richard Faille s’est assuré la clientèle d’une centaine de sites français pour un total d’un million de billets, le tirage de base étant alors de 10.000 exemplaires. Si le premier billet créé l’a été pour Notre-Dame de la Garde à Marseille, tiré à ce jour à 80.000 exemplaires tous modèles confondus, c’est l’Arc de Triomphe de l’Étoile qui a été le plus édité, avec 175.000 exemplaires en 6 tirages. La Tour Eiffel est un peu derrière avec 95.000 exemplaires, et le Viaduc de Millau, qui faisait partie de la première fournée de 2015, réalise le score honorable de 50.000 en 5 tirages.
0 euro, combien ça coûte ?
Le billet de 0 euros a un prix, 2 euros vendu sur site, à l’exception de la Tour Eiffel, qui coûte 2,50 euros. Alors que les tirages initiaux étaient de 10.000, on peut disposer aujourd’hui de son propre billet à partir de 3.000 exemplaires pour un coût unitaire de 1,05 euros hors taxes, le tarif étant dégressif pour des tirages plus importants (0,80 pour 10.000 billets). Ce tarif comprend l’adaptation du visuel et permet aux sites candidats de disposer «d’un produit haut de gamme et pas cher», comme l’explique Richard Faille, qui précise : «En-dessous, il n’y a que la carte postale».
Selon la taille des sites, le mode de revente peut aller d’un simple présentoir à un distributeur de billet, comme pour les pièces. L’homme d’affaire auvergnat met d’ailleurs en avant la promotion des sites touristiques et, par les bénéfices générés, la préservation du patrimoine. Le prix de revente aux sites et la qualité du produit ne lui laissent “que” quelques centimes par billet, et quand on lui demande si son invention est rentable, il répond simplement : «C’est extrêmement rentable pour les sites touristiques ! 1er chiffre d’affaires en boutique !». La société de Richard Faille emploie à ce jours 14 personnes et 32 pays sont sous licence.
Alors, à quand un billet Pont-Vieux et/ou Vieux-Palais, Clocher de Saint-Côme, Taureau de Laguiole ou Transhumance ? Voire Bulletin d’Espalion, ce qui serait une première pour un journal…
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.