Depuis l'élection municipale de 2014, je me suis abstenu de tout commentaire dans nos colonnes et j'ai toujours relaté les actions de la mairie dans la plus stricte neutralité. Aujourd'hui, c'est en tant que Saint-Cômois que je tiens à donner mon avis sur une décision qui semble avoir été prise sans beaucoup de concer-tation, et dont l'exécution va se faire dans la précipitation : le déplacement du monument aux Morts. J’ai hésité avant d’évoquer ce sujet, mais le fait d’avoir croisé, ces derniers jours, plusieurs Saint-Cômois pour le moins du-bitatifs ou carrément opposés à ce déplacement m’a encouragé à en dire quelques mots. En effet, c’est à la lecture du Bulletin d’Espalion du 11 octobre que nous avons appris que le square de la mairie serait rebaptisé du nom du général de Castelnau, proposition adoptée par l’ensem-ble du conseil municipal, mais surtout que le monument aux Morts y serait déplacé et inau-guré le 11 novembre, c’est-à-dire dans moins d’un mois ! Sans qu’aucun projet d’aménagement n’ait été présenté. Un monument placé
"sous la pieuse et vigilante sauvegarde de la population" C'est en 1923, le 22 juillet, que le monument aux Morts a été inauguré, à l'occasion de l'une des seules, voire la seule visite offi-cielle du général de Castelnau à Saint-Côme. Il a été accueilli, entre autres personnalités, par Joseph Boscary, maire, Joseph Lacroix, conseiller général, et Casimir Palous, juge, mais qui fut surtout, pour le sujet qui nous in-téresse, officier supérieur de ré-serve, en l'occurence comman-dant, de 1909 à 1917, dans le 95e régiment d'infanterie territoriale. Vous vous en doutez, il s'agit de mon arrière-arrière-grand-père. Ancien chef de bataillon, il devint tout naturellement président du comité créé en 1919 pour l'érec-tion du monument aux Morts, sur lequel le nom de son fils, Louis, devait figurer aux côtés de ceux de 77 autres jeunes Saint-Cômois “Morts pour la France”. Dans son discours d'inauguration, on peut lire la phrase suivante : "En remettant ce monument à la municipalité, le comité le place sous la pieuse et vigilante sauve-garde de la population afin qu'il soit transmis à nos descendants, en commémoration du suprême devoir accompli par les Saint-Cô-mois, dans la plus grande tempête qui ait bouleversé le monde". Que sait-on du projet ? Je tiens à préciser que je ne suis pas opposé au changement et, en ce qui concerne le monument, je ne pense pas qu'il soit sacrilège de le déplacer, encore faut-il que cette décision soit motivée. Ce transfert, certes évoqué en 2014, n’a fait l’objet de la mise en place d’aucune commission, qu’elle soit municipale ou extra-municipale. Un transfert est simplement "en-visagé" au cours du conseil mu-nicipal du 20 novembre 2017 dans les questions diverses. Le 18 jan-vier 2018, toujours en conseil mu-nicipal, il fait l’objet d’un chiffrage "estimé à 12.157,50 € et il peut être financé par une subvention DETR (4.863 €)" (12 voix pour 3 contre). Il est finalement inscrit au budget pour un montant de 8.000 € le 12 avril dernier. Au cours du conseil municipal du 18 janvier, les rai-sons invoquées pour le déplace-ment étaient "qu’en bordure de route le rassemblement est difficile lors des commémorations et qu’en raison de la future maison de santé en lieu et place de l’an-cienne école publique, son empla-cement serait récupéré pour faire un accès direct". Autre explication, apportée dans le journal munici-pal de mars 2018 (et dernière évo-cation publique du sujet) : "agran-dir le parking qui se trouve devant l’ancienne école afin de faciliter l’accès aux commerces proches et surtout, anticiper les besoins de stationnement de la future Maison de santé, projet qui devrait se fi-naliser en 2018". Les deux hypo-thèses entraînant la création d’un carrefour supplémentaire au mi-lieu de l’avenue. Pour une cérémonie par an La loi n°2012-273 du 28 février 2012 fait du 11 novembre une journée d’hommage "à tous les Morts pour la France". On ne se rassemble donc plus qu’une seule fois par an au monument aux Morts : une gêne, somme toute mi-nime, qui implique de dévier la cir-culation pendant une demi-heure. Le problème aurait pu être réglé en faisant pivoter le monument d’un quart de tour vers la rue de l’Ouradou et en le rapprochant des Jardins d’Éliane, réduisant ainsi son emprise au sol et dégageant un espace suffisant pour la céré-monie. Cette solution, par ailleurs pro-posée par les élus d’opposition, permettrait de gagner des places le long de l’avenue tout en connec-tant cette dernière au parking de la bibliothèque, voire en créant en-core quelques places autour du monument, c’est-à-dire exacte-ment le but recherché, tout en s’épargnant des travaux d’amé-nagement supplémentaires der-rière la mairie.
Un double chantier au sujet du-quel, en l’absence de projet dé-taillé, on peut se poser la question du coût : la somme de 12.157,50 € (dont 8.000 à la charge de la com-mune) concerne-t-elle le seul transfert de la stèle, ou bien en-globe-t-elle le réaménagement de l’ancien site sur l’avenue d’Aubrac— qui nécessite pour le moins quelques travaux —, et l’inévita-ble transformation de la pelouse de la mairie ? Quel avenir pour le square de la mairie ? Après la disparition du Pargou, ce petit jardin qui faisait face au pont, c’est la verdure et les cyprès qui entourent le monument aux Morts qui semblent condamnés à leur tour. Mais quid du square de la mairie ? Toujours dans le jour-nal municipal de mars 2018, on apprend qu’il fait partie du projet “Itinérance”, dont l’objectif "est de fournir de meilleures conditions d’accueil aux visiteurs qui s’arrê-tent sur cette place". La pelouse "restreinte" et l’absence de toilettes et d’abri sont également évoquées. Mais l’implantation du monu-ment aux Morts n’entraînera-t-elle pas inévitablement un dallage ou un bétonnage du square ? Car si nos poilus ont pataugé plus sou-vent qu’à leur tour dans la boue des tranchées, devra-t-on célé-brer le 11 novembre en bottes en cas de mauvais temps ? Sanctuarisation du square ou mise au placard
du monument ? Le déplacement de la stèle pose donc la question suivante : va-t-on sanctuariser le square de la mai-rie, le rendant peu compatible avec une aire de pique-nique et de repos pour les marcheurs et pèle-rins, et encore moins avec les évènements festifs de l’été entre Saint-Cômois, ou bien va-t-on mettre la stèle dans un coin, la re-léguant ainsi, pour 4 ou 5 places de parking gagnées, dans un ou-bli peu en rapport avec le travail de mémoire effectué depuis 2014 ? Il semble compliqué de mener cette opération à bien en trois se-maines, alors qu’on avait le temps, en quatre ans, de réfléchir au projet, par exemple en y associant la population. La "commémoration du suprême devoir accompli par les Saint-Cômois" aurait mérité, me semble-t-il, encore un peu de réflexion. Et d’information.
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