«Quel roman que ma vie !» Cette citation, que nous devons à l’Empereur Napoléon I
er, aurait tout aussi bien pu sortir de la bouche d’Emma Calvé, cette diva assoluta qui, sortie encore adolescente de son Rouergue natal, sans fortune et sans culture particulière, parvint, par la seule force de son talent et de son inépuisable travail, à mettre le monde entier à ses pieds.
Son immense carrière, d’une longévité exceptionnelle pour une artiste lyrique (53 années passées à chanter, en moyenne, quatre heures par jour), se déroula de la fin du XIX e siècle au début du XX e siècle. Il est difficile d’imaginer la notoriété qu’elle eut à cette époque, pouvant rivaliser avec celle des plus grandes vedettes actuelles du show-business, et alors que les moyens de communication se réduisaient à de simples journaux. Pourtant, qui se souvient aujourd’hui d’Emma Calvé, de cette grande dame qui se dépensa sans compter aux Etats-Unis, pendant des mois entiers, afin d’y récolter de l’argent pour nos poilus de la Grande Guerre, et qui n’hésita pas davantage à débourser des sommes folles dans la création d’un sanatorium pour les petites filles pauvres de Millau ? Par certains côtés, Emma nous rappelle une autre artiste au grand cœur, la célèbre Joséphine Baker qui adopta jusqu’à onze enfants — venus de divers horizons — dans le but évident de leur procurer un avenir meilleur. Cette même Joséphine Baker, naturalisée française, avait, comme Emma, le patriotisme chevillé au corps, n’ayant pas hésité à se mettre au service du contre-espionnage français dès le début de la Seconde Guerre mondiale, puis à poursuivre le combat dans les rangs de la France Libre. Notons également que toutes deux acquirent un château : Emma jeta son dévolu sur le château de Cabrières (situé à une dizaine de kilomètres de Millau), tandis que Joséphine choisissait de s’établir en Dordogne, dans le château des Milandes. Enfin, nos deux artistes eurent de gros soucis d’argent quelques années avant de disparaître. Il est étonnant de voir à quel point ces deux destinées se rejoignent. Mais il est temps de revenir à Emma Calvé (de son vrai nom, Calvet), fille du Rouergue qui jamais n’oublia son «país».
Rosa Noémie Emma Calvet naquit à Decazeville (Aveyron) le 15 août 1858, à onze heures du matin. Son père, Justin Etienne Calvet (né en 1824), et sa mère, Adèle Léonie Astorg (née en 1835), ont convolé en justes noces deux ans auparavant, plus exactement le 16 juillet 1856. C’est en travaillant dans le bassin houiller d’Aubin-Decazeville que Justin, entrepreneur spécialisé dans le boisage des galeries de mines, fait la connaissance d’Adèle, ou plutôt de Léonie, puisqu’à cette époque, il est courant d’utiliser son deuxième ou troisième prénom comme prénom usuel (ce que fera d’ailleurs Emma). Léonie, donc, fille d’un de ces agriculteurs du Bassin qui partagent leur temps entre le travail aux champs et celui à l’usine, est une charmante personne qui ne manque ni de beauté ni d’intelligence. De surcroît, sa voix mélodieuse l’encourage à chanter aussi souvent qu’elle le peut. On comprend, dans ces conditions, qu’elle n’eût aucune peine à charmer son Larzacois de mari, comme on sait également de qui tient sa prodigieuse fille. Trois mois seulement après sa naissance, voilà la petite Emma forcée de voyager — ce qu’elle fera, d’ailleurs, toute sa vie durant —, à cause de son père appelé à travailler sur un nouveau chantier au Pays basque espagnol. Il faut dire que Justin, aussi ambitieux que travailleur, n’a pas peur de s’expatrier pour faire fortune. Et force est de constater que son époque lui fournit de formidables opportunités. Le chemin de fer est, effectivement, en plein développement (et pas seulement en France), et devinez qui va fournir les traverses de certaines voies ferrées ? La famille Calvet restera cinq ans au Pays basque espagnol, ce qui imprégnera la petite Emma d’une façon toute particulière, transparaissant dans son langage tout à fait unique, mélange d’espagnol, de français, de basque et de patois rouergat ! A tel point qu’il faudra lui réapprendre le français avant de l’envoyer à l’école !
En 1865, les Calvet se retrouvent à Montpellier, toujours pour le travail de Justin, où Léonie mettra au monde un second enfant, un fils prénommé Paul-Justin qui ne vivra malheureusement qu’une dizaine d’années. Trois ans plus tard, la famille Calvet s’agrandit d’un autre fils, Adolphe, avec lequel Emma nouera des liens d’affection que rien ne pourra défaire. Cependant, Emma passera à côté des premières années de sa vie, ayant été confiée, depuis 1868 (lorsque ses parents étaient à Turin), aux bons soins de la sœur aînée de Justin, la tante Caylet qui habite toujours la demeure familiale de La Bastide-Pradines, localité perchée sur une saillie rocheuse dominant la vallée du Cernon. Il faut dire que la vie d’errance imposée par le travail de Justin n’est pas faite pour donner à un enfant toute la stabilité dont il a besoin, surtout lorsque celui-ci est scolarisé. Bien entendu, et malgré tout l’amour que lui donne sa tante, c’est un déchirement pour Emma d’être ainsi séparée de ses parents, et plus particulièrement de sa mère. Cette dernière, elle-même, éprouve un grand chagrin d’être aussi éloignée de sa fille aînée. Mais il faut penser à l’avenir de l’enfant et lui donner, pour cela, une bonne éducation. A cet effet, son père l’a mise en pension dans différents instituts religieux. Ainsi, Emma va-t-elle fréquenter le couvent de Millau, ou encore celui de Saint-Affrique, où la discipline est sévère et les conditions de vie parfois spartiates (les dortoirs étant mal chauffés, voire pas du tout), mais qui vont sans doute de pair avec un enseignement de qualité. Mieux, à Saint-Affrique, les cours de musique sont obligatoires, ce qui permet à Emma d’acquérir, sous la houlette d’un vieux professeur, ses premiers rudiments de solfège, de piano, de violon et de chant qui décideront vraisemblablement de sa vocation. En attendant, quel plaisir pour Emma que de retrouver, aux vacances scolaires, l’ambiance chaleureuse de «l’oustal» de la tante Caylet. Celle-ci se met en quatre pour sa nièce, s’affairant au fourneau afin de lui préparer des bons petits plats dont elle seule a le secret. Et puis, il y a Finou, la fidèle servante qui chérit Emma comme si c’était sa propre fille, sans oublier le brave Blaise, ce maître-valet qu’elle ne voit, toutefois, qu’au retour de l’estive, lorsque les brebis prennent leurs quartiers d’hiver. Mais quand tout ce petit monde est réuni, le soir, devant le «cantou», à déguster quelques châtaignes grillées, quel bonheur pour Emma d’entendre le berger raconter quelques vieilles histoires caussenardes à vous faire dresser, parfois, les cheveux sur la tête ! Et avant que tout le monde aille se coucher, il est d’usage, chez la veuve Caylet, de réciter ensemble la prière du soir. Une fois celle-ci achevée, la tante ne manque jamais, avant même de se rendre dans sa chambre, de saluer la mémoire de son père (le grand-père d’Emma), Julien Barthélémy Calvet qui combattit dans la Grande Armée de Napoléon I er. On raconte que l’ancien soldat se comporta héroïquement à la bataille de Wagram (5 et 6 juillet 1809), ce qui lui aurait valu d’être décoré par l’Empereur en personne. Malheureusement, nous n’avons trouvé aucun document en attestant, ce qui ne veut pas dire que ces faits ne se soient pas produits. Par contre, nous pouvons être certains de ces paroles prononcées par le vieux grognard sur son lit de mort, paroles dont la tante fut le témoin privilégié et que nous rapporte Emma Calvé dans ses Mémoires («Sous tous les ciels j’ai chanté», Editions Plon, 1940) : «J’ai assez vécu. Je me suis bien battu pour la France. J’ai reçu cinq blessures. J’ai eu huit enfants. J’ai adoré deux êtres au monde : l’Empereur et ma femme. Ils sont morts tous les deux. Je n’ai plus qu’à aller les rejoindre». En l’année 1874 a lieu l’incontournable fête de fin d’année au couvent de Saint-Affrique. Pour cette occasion, l’évêque de Rodez, Monseigneur Bourret, a fait le déplacement. Après la messe, Emma, déjà talentueuse et accoutumée à être mise en avant par son couvent (pour lire l’évangile du jour, jouer une saynète ou tout simplement chanter sur scène), a été naturellement choisie pour chanter, en solo, «Les Hirondelles» de Félicien David. Une fois n’est pas coutume, Léonie, la mère d’Emma, est présente pour applaudir sa fille et recevoir les compliments de l’évêque, lequel lui aurait dit : «Toutes mes félicitations, ma fille. C’est la voix du bon Dieu que cette enfant a dans la gorge». A ces mots, Léonie comprend que le destin de sa fille est de devenir une grande cantatrice, et il ne lui faudra pas très longtemps pour tout mettre en œuvre afin de mettre sa fille sur la «bonne voie».
Emma, de son côté, a terminé ses études et a réussi, dans la foulée, le concours d’entrée dans les Postes. Néanmoins, consciente de son talent et peu encline à faire carrière dans l’administration des Postes, elle songe, elle aussi, après avoir fêté ses seize ans, à devenir une «diva». Un événement va tout déclencher : le départ du père pour l’Amérique du Sud. En effet, Justin voit dans ce lointain continent, décidé à se moderniser et à se doter, par conséquent, du chemin de fer, l’occasion de devenir riche. N’y aura-t-il pas plusieurs millions de traverses à poser ? Mais un tel voyage épouvante la brave Léonie qui, jusqu’ici, avait toujours suivi son mari sans rien dire. Justin veut partir ? Soit ! Mais il partira seul. Léonie, quant à elle, restera en France avec ses enfants, et surtout avec cette fille qu’elle n’a pas vu grandir. A peine Justin s’est-il embarqué pour les lointaines Amériques que Léonie a préparé ses bagages et ceux de ses enfants. Leur destination ? Paris, cette «Ville Lumière» qui permettra assurément à Emma d’accomplir son rêve. Ayant gagné Clermont en diligence, et en compagnie de son fils Adolphe (Paul-Justin n’étant déjà plus de ce monde), Léonie a demandé à Emma de la rejoindre en cet endroit où les attend le train à destination de la capitale. Mais avant de retrouver sa famille à Clermont, Emma doit s’acquitter d’une tâche délicate : faire ses adieux à sa tante. La veuve Caylet est aux quatre cents coups lorsqu’elle apprend que la «fantoune» va devenir une «comédienne», ce qui ne l’empêche pas de lui remettre une bourse garnie de quelques louis d’or…
À suivre…
Son immense carrière, d’une longévité exceptionnelle pour une artiste lyrique (53 années passées à chanter, en moyenne, quatre heures par jour), se déroula de la fin du XIX e siècle au début du XX e siècle. Il est difficile d’imaginer la notoriété qu’elle eut à cette époque, pouvant rivaliser avec celle des plus grandes vedettes actuelles du show-business, et alors que les moyens de communication se réduisaient à de simples journaux. Pourtant, qui se souvient aujourd’hui d’Emma Calvé, de cette grande dame qui se dépensa sans compter aux Etats-Unis, pendant des mois entiers, afin d’y récolter de l’argent pour nos poilus de la Grande Guerre, et qui n’hésita pas davantage à débourser des sommes folles dans la création d’un sanatorium pour les petites filles pauvres de Millau ? Par certains côtés, Emma nous rappelle une autre artiste au grand cœur, la célèbre Joséphine Baker qui adopta jusqu’à onze enfants — venus de divers horizons — dans le but évident de leur procurer un avenir meilleur. Cette même Joséphine Baker, naturalisée française, avait, comme Emma, le patriotisme chevillé au corps, n’ayant pas hésité à se mettre au service du contre-espionnage français dès le début de la Seconde Guerre mondiale, puis à poursuivre le combat dans les rangs de la France Libre. Notons également que toutes deux acquirent un château : Emma jeta son dévolu sur le château de Cabrières (situé à une dizaine de kilomètres de Millau), tandis que Joséphine choisissait de s’établir en Dordogne, dans le château des Milandes. Enfin, nos deux artistes eurent de gros soucis d’argent quelques années avant de disparaître. Il est étonnant de voir à quel point ces deux destinées se rejoignent. Mais il est temps de revenir à Emma Calvé (de son vrai nom, Calvet), fille du Rouergue qui jamais n’oublia son «país».
Rosa Noémie Emma Calvet naquit à Decazeville (Aveyron) le 15 août 1858, à onze heures du matin. Son père, Justin Etienne Calvet (né en 1824), et sa mère, Adèle Léonie Astorg (née en 1835), ont convolé en justes noces deux ans auparavant, plus exactement le 16 juillet 1856. C’est en travaillant dans le bassin houiller d’Aubin-Decazeville que Justin, entrepreneur spécialisé dans le boisage des galeries de mines, fait la connaissance d’Adèle, ou plutôt de Léonie, puisqu’à cette époque, il est courant d’utiliser son deuxième ou troisième prénom comme prénom usuel (ce que fera d’ailleurs Emma). Léonie, donc, fille d’un de ces agriculteurs du Bassin qui partagent leur temps entre le travail aux champs et celui à l’usine, est une charmante personne qui ne manque ni de beauté ni d’intelligence. De surcroît, sa voix mélodieuse l’encourage à chanter aussi souvent qu’elle le peut. On comprend, dans ces conditions, qu’elle n’eût aucune peine à charmer son Larzacois de mari, comme on sait également de qui tient sa prodigieuse fille. Trois mois seulement après sa naissance, voilà la petite Emma forcée de voyager — ce qu’elle fera, d’ailleurs, toute sa vie durant —, à cause de son père appelé à travailler sur un nouveau chantier au Pays basque espagnol. Il faut dire que Justin, aussi ambitieux que travailleur, n’a pas peur de s’expatrier pour faire fortune. Et force est de constater que son époque lui fournit de formidables opportunités. Le chemin de fer est, effectivement, en plein développement (et pas seulement en France), et devinez qui va fournir les traverses de certaines voies ferrées ? La famille Calvet restera cinq ans au Pays basque espagnol, ce qui imprégnera la petite Emma d’une façon toute particulière, transparaissant dans son langage tout à fait unique, mélange d’espagnol, de français, de basque et de patois rouergat ! A tel point qu’il faudra lui réapprendre le français avant de l’envoyer à l’école !
Une enfance chez sa tante
En 1865, les Calvet se retrouvent à Montpellier, toujours pour le travail de Justin, où Léonie mettra au monde un second enfant, un fils prénommé Paul-Justin qui ne vivra malheureusement qu’une dizaine d’années. Trois ans plus tard, la famille Calvet s’agrandit d’un autre fils, Adolphe, avec lequel Emma nouera des liens d’affection que rien ne pourra défaire. Cependant, Emma passera à côté des premières années de sa vie, ayant été confiée, depuis 1868 (lorsque ses parents étaient à Turin), aux bons soins de la sœur aînée de Justin, la tante Caylet qui habite toujours la demeure familiale de La Bastide-Pradines, localité perchée sur une saillie rocheuse dominant la vallée du Cernon. Il faut dire que la vie d’errance imposée par le travail de Justin n’est pas faite pour donner à un enfant toute la stabilité dont il a besoin, surtout lorsque celui-ci est scolarisé. Bien entendu, et malgré tout l’amour que lui donne sa tante, c’est un déchirement pour Emma d’être ainsi séparée de ses parents, et plus particulièrement de sa mère. Cette dernière, elle-même, éprouve un grand chagrin d’être aussi éloignée de sa fille aînée. Mais il faut penser à l’avenir de l’enfant et lui donner, pour cela, une bonne éducation. A cet effet, son père l’a mise en pension dans différents instituts religieux. Ainsi, Emma va-t-elle fréquenter le couvent de Millau, ou encore celui de Saint-Affrique, où la discipline est sévère et les conditions de vie parfois spartiates (les dortoirs étant mal chauffés, voire pas du tout), mais qui vont sans doute de pair avec un enseignement de qualité. Mieux, à Saint-Affrique, les cours de musique sont obligatoires, ce qui permet à Emma d’acquérir, sous la houlette d’un vieux professeur, ses premiers rudiments de solfège, de piano, de violon et de chant qui décideront vraisemblablement de sa vocation. En attendant, quel plaisir pour Emma que de retrouver, aux vacances scolaires, l’ambiance chaleureuse de «l’oustal» de la tante Caylet. Celle-ci se met en quatre pour sa nièce, s’affairant au fourneau afin de lui préparer des bons petits plats dont elle seule a le secret. Et puis, il y a Finou, la fidèle servante qui chérit Emma comme si c’était sa propre fille, sans oublier le brave Blaise, ce maître-valet qu’elle ne voit, toutefois, qu’au retour de l’estive, lorsque les brebis prennent leurs quartiers d’hiver. Mais quand tout ce petit monde est réuni, le soir, devant le «cantou», à déguster quelques châtaignes grillées, quel bonheur pour Emma d’entendre le berger raconter quelques vieilles histoires caussenardes à vous faire dresser, parfois, les cheveux sur la tête ! Et avant que tout le monde aille se coucher, il est d’usage, chez la veuve Caylet, de réciter ensemble la prière du soir. Une fois celle-ci achevée, la tante ne manque jamais, avant même de se rendre dans sa chambre, de saluer la mémoire de son père (le grand-père d’Emma), Julien Barthélémy Calvet qui combattit dans la Grande Armée de Napoléon I er. On raconte que l’ancien soldat se comporta héroïquement à la bataille de Wagram (5 et 6 juillet 1809), ce qui lui aurait valu d’être décoré par l’Empereur en personne. Malheureusement, nous n’avons trouvé aucun document en attestant, ce qui ne veut pas dire que ces faits ne se soient pas produits. Par contre, nous pouvons être certains de ces paroles prononcées par le vieux grognard sur son lit de mort, paroles dont la tante fut le témoin privilégié et que nous rapporte Emma Calvé dans ses Mémoires («Sous tous les ciels j’ai chanté», Editions Plon, 1940) : «J’ai assez vécu. Je me suis bien battu pour la France. J’ai reçu cinq blessures. J’ai eu huit enfants. J’ai adoré deux êtres au monde : l’Empereur et ma femme. Ils sont morts tous les deux. Je n’ai plus qu’à aller les rejoindre». En l’année 1874 a lieu l’incontournable fête de fin d’année au couvent de Saint-Affrique. Pour cette occasion, l’évêque de Rodez, Monseigneur Bourret, a fait le déplacement. Après la messe, Emma, déjà talentueuse et accoutumée à être mise en avant par son couvent (pour lire l’évangile du jour, jouer une saynète ou tout simplement chanter sur scène), a été naturellement choisie pour chanter, en solo, «Les Hirondelles» de Félicien David. Une fois n’est pas coutume, Léonie, la mère d’Emma, est présente pour applaudir sa fille et recevoir les compliments de l’évêque, lequel lui aurait dit : «Toutes mes félicitations, ma fille. C’est la voix du bon Dieu que cette enfant a dans la gorge». A ces mots, Léonie comprend que le destin de sa fille est de devenir une grande cantatrice, et il ne lui faudra pas très longtemps pour tout mettre en œuvre afin de mettre sa fille sur la «bonne voie».
Départ pour Paris…
Emma, de son côté, a terminé ses études et a réussi, dans la foulée, le concours d’entrée dans les Postes. Néanmoins, consciente de son talent et peu encline à faire carrière dans l’administration des Postes, elle songe, elle aussi, après avoir fêté ses seize ans, à devenir une «diva». Un événement va tout déclencher : le départ du père pour l’Amérique du Sud. En effet, Justin voit dans ce lointain continent, décidé à se moderniser et à se doter, par conséquent, du chemin de fer, l’occasion de devenir riche. N’y aura-t-il pas plusieurs millions de traverses à poser ? Mais un tel voyage épouvante la brave Léonie qui, jusqu’ici, avait toujours suivi son mari sans rien dire. Justin veut partir ? Soit ! Mais il partira seul. Léonie, quant à elle, restera en France avec ses enfants, et surtout avec cette fille qu’elle n’a pas vu grandir. A peine Justin s’est-il embarqué pour les lointaines Amériques que Léonie a préparé ses bagages et ceux de ses enfants. Leur destination ? Paris, cette «Ville Lumière» qui permettra assurément à Emma d’accomplir son rêve. Ayant gagné Clermont en diligence, et en compagnie de son fils Adolphe (Paul-Justin n’étant déjà plus de ce monde), Léonie a demandé à Emma de la rejoindre en cet endroit où les attend le train à destination de la capitale. Mais avant de retrouver sa famille à Clermont, Emma doit s’acquitter d’une tâche délicate : faire ses adieux à sa tante. La veuve Caylet est aux quatre cents coups lorsqu’elle apprend que la «fantoune» va devenir une «comédienne», ce qui ne l’empêche pas de lui remettre une bourse garnie de quelques louis d’or…
À suivre…
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